Sahara Occidental, Maroc et la France: Vol d’État

Par Jean-François Debargue

« Le Tchad n’est pas une sous-préfecture de la France » criait le peuple Tchadien lors des funérailles de son Président-dictateur, funérailles lors desquelles le seul chef d’État présent était Mr Macron. Les peuples du Mali, du Rwanda, du Sénégal, du Maroc et bien d’autres pourraient reprendre ce slogan.

Comment s’étonner que des prédateurs se sentent autorisés et couverts lorsque l’exemple vient d’en haut ?

« Faut-il encore investir en Afrique ? Bien sûr! Nous ne sommes pas des sociétés de bienfaisance ! Si nous ne trouvions pas notre compte en Afrique, nous n’y serions plus. D’ailleurs les grands groupes sont toujours présents sur ce continent » (J.L Castelnau, Président du Conseil Français des investisseurs en Afrique- Le Figaro 02/12/2004).

Lors de son voyage en Afrique de l’Est en 2019, la délégation de « Business France » accompagne Mr Macron. Un an plus tôt à Ouagadougou, ce dernier clamait pourtant qu’il « n’y a plus de politique africaine de la France ». Comme d’autres chefs d’État africains, Mahamadou Issoufou, Directeur de la mine d’uranium d’Arlit pour Areva, devenu Chef d’État du Niger, a dû pour le moins sourire en entendant le digne successeur de nos présidents françafricains ! Rappelons qu’une ampoule sur trois en France est éclairée grâce à l’uranium nigérien, classé dernier pays à l’IDH (Indice de développement humain). Le pays le plus pauvre éclaire la 5 ème puissance mondiale à un coût se situant entre l’aumône et le pillage.

Lorsqu’elle ne concourt pas à les installer, la France soutient ceux qu’elle considère comme ses sous-préfets depuis De Gaulle qui reconnaissait que l’indépendance énergétique de la France dépendait des ressources de l’Afrique. Notre indépendance économique dépend bien de la dépendance de ces pays comme au bon vieux temps des colonies, bien loin d’une économie de marché réglementée.

Total applique aujourd’hui son soutien aux généraux birmans comme il a appris à le faire en son jardin d’Afrique, Lafarge fit de même avec Daech. Bolloré trempe sans crainte dans des affaires de corruption au Cameroun, au Togo et en Guinée Conakry. Bouygues, Vinci, Véolia, BNP Paribas, Areva, sans compter les marchands d’armes (liste malheureusement non exhaustive) sont présents et souvent sur le podium, notamment là où sévissent les régimes autoritaires et archi-corrompus. On ne compte plus les conseillers des ministères français passés dans ces entreprises…

La Françafrique continue de se porter bien, merci pour elle.

Pillage économique, vol d’Etat

Elle ne cache même plus les liens tissés entre économie et politique. Au Sahara Occidental, pays en attente de décolonisation que des pays prédateurs hors la loi dont la France pillent allègrement, LREM ouvre une antenne politicommerciale à Dakhla. Coïncidence, ses dirigeants ont investi sur place dans des secteurs clés (Tourisme, matériel pour l’industrie halieutique et maraîchère). Seront du voyage, avec des élus de Françafrique, le géant du BTP français Eiffage, qui espère décrocher la construction du futur port de Dakhla, ainsi que des investisseurs invités en forum à se partager le gâteau d’un peuple sahraoui exilé dans les camps de réfugiés, en diaspora ou réprimé dans son propre territoire devenu prison.

A un an d’élections présidentielles, il est temps d’investir pour financer une campagne toujours coûteuse…Le temps des mallettes, notamment les fameuses d’Omar Bongo, ne permet plus aujourd’hui ces générosités d’ascenseurs renvoyés. Ouvrir une permanence d’un parti politique au Sahara Occidental est un cadeau fait au roi du Maroc qui peut rapporter gros. Tout le monde est gagnant sur le dos du peuple sahraoui

La politique des sous-préfectures permet et promet « des jours heureux » chers au Président.

Le Maroc, ancien « protectorat », met à la disposition de son toujours «protecteur» un territoire qui n’est pas le sien et qu’il considère, l’exemple faisant des émules, comme sa propre sous-préfecture .

Il est plusieurs degrés sur l’échelle économique. Le pillage moderne des entreprises royales, loin d’une économie éthique et respectueuse (oxymore?), bafouant les règles établies s’associe sans surprise au Sahara Occidental avec des entreprises françaises partageant la même absence de scrupules.

Le respect des Droits Internationaux, comme celui des Droits Humains n’a pas sa place dans ces pays d’Afrique que la France considère encore comme ses domaines réservés. Ici, en instrumentalisant l’ONU, on coule depuis des décennies une chape de silence sur laquelle on bâtit des profits illégaux. L’histoire dure depuis 45 ans. Au moins deux générations sont nées et survivent en exil ou asservies dans la dernière colonie d’Afrique.

Pendant ce temps, « les bourreaux tuent toujours deux fois. La deuxième fois par l’oubli ». ( Elie Wiesel )

Au Sahara Occidental aujourd’hui, comme ailleurs par le passé, la France est toujours là , à chacune de ces deux fois.

24hDZ, 07 mai 2021

Etiquettes : Sahara Occidental, France, Maroc, pillage, exploitation,

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