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Les révélations des Pandora Papers par le Consortium international des journalistes d’investigation (CIJI) mettent, une nouvelle fois, en évidence l’utilisation des sociétés offshore, ces sociétés logées dans des paradis fiscaux. Iles Caïmans, Panama, que sont ces sociétés créées dans ces paradis fiscaux ? Comment sont-elles utilisées ? Notre rédaction a posé la question à Antoine Chomé, Avocat, spécialiste du Droit pénal des affaires.
Une société offshore, c’est quoi ?
« Une société offshore n’a pas de définition légale en Belgique. C’est simplement une société qui est installée dans un paradis fiscal, c’est-à-dire un endroit où la fiscalité est particulièrement avantageuse », explique Me Antoine Chomé.
Une société offshore : c’est légal ou pas ?
« On bascule dans l’illégalité à partir du moment où une société va s’établir dans un paradis fiscal juste dans le but d’éluder l’impôt », explique Me Antoine Chomé. « Toute la difficulté, c’est qu’il faut pouvoir démontrer que cette société a été créée dans le seul but d’éviter de payer l’impôt là où elle devrait normalement le payer », poursuit l’avocat.
Un exemple ?
« Si vous avez un entrepreneur qui travaille dans le domaine de la construction en Belgique et qui n’a aucun lien, aucune attache avec le Panama, mais qui décide d’envoyer toutes ses factures et sa facturation par le biais du Panama, ça pourrait poser des difficultés, puisqu’effectivement, il élude la TVA et, éventuellement, l’impôt des sociétés et les revenus professionnels qu’il pourrait tirer de son activité en passant par le Panama, sans aucune réalité économique, sans aucune réalité de terrain, puisqu’il ne construit rien et ne fait rien au Panama », illustre Me Antoine Chomé.
Par contre, si une entreprise belge « crée une deuxième société établie, par exemple au Panama ou aux îles Caïmans, pour effectuer des prestations qu’elle effectue sur place, il n’y aurait pas de reproches à lui faire, quand bien même on parlerait d’une société offshore, puisqu’il y a une réalité économique, une réalité de terrain et une activité exercée sur place », précise Me Chomé.
Comment fait-on croire à une activité réelle sur place ?
« Les entreprises sont souvent appelées par des fiduciaires et des personnes spécialisées dans le domaine. Elles vont aller véritablement séduire, il y a une sorte de marketing du paradis fiscal offshore en disant qu’on va gérer tout l’administratif dans le paradis fiscal et que l’entreprise n’aura plus de questions à se poser et qu’elle sera le bénéficiaire et l’actionnaire principal de l’entreprise (créée dans le paradis fiscal) qui va tirer différents revenus », détaille Me Chomé.
Pour brouiller les pistes, « souvent ces fiduciaires ou ces comptables de luxe s’indiquent comme étant eux-mêmes les administrateurs de la société. Ce qui rend difficile le lien entre la personne physique qui élude l’impôt et la société X, Y ou Z qui est établie dans un paradis fiscal », explique Me Chomé.
En recourant à une société fictive…
« On a déjà vu dans des dossiers, par exemple, une entreprise qui travaille en Belgique et qui dit qu’elle sous-traite au Maroc avec une société marocaine. On constate qu’en réalité, au Maroc, il n’y a personne sur place. Il y a des mails qui passent de la Belgique vers le Maroc de manière automatique et qui sont renvoyés pour faire croire que sur place, il y a une activité. Mais quand on demande des renseignements au Maroc pour savoir s’il y a des personnes qui travaillent sur place, la réponse est non. Il y a juste un bureau comptable », explique l’avocat Antoine Chomé.
Qu’est-ce qui met la puce à l’oreille du fisc ou de la Justice ?
Il y a d’abord, explique Me Chomé, la « CTIF, la Cellule de Traitement des Informations financières, qui recueille des milliers de données quotidiennement, notamment sur les transactions financières » (ndlr : les banques ont l’obligation de l’avertir en cas de transactions financières douteuses).
« Vous avez une liste des paradis fiscaux (établie par l’OCDE). Donc le fisc voit, par exemple, des gros montants arriver d’un compte étranger et installé dans un paradis fiscal ou, à l’inverse, il voit des montants sortir. Cela peut être un indice de fraude. Sur base de cela, une enquête peut démarrer. Ce sera soit par l’Inspection Spéciale des Impôts, soit le Parquet s’il y a un volet pénal à la fraude ficale », explique Me Antoine Chomé.
Difficile de prouver la fraude dans un paradis fiscal
« C’est toute la difficulté avec les paradis fiscaux. Leur fiscalité est avantageuse, mais ils ne répondent pas aux demandes du fisc. Quand le fisc ou le Procureur ou le Juge d’instruction demandent des informations dans ces paradis fiscaux, les pays refusent de répondre », explique Me Chomé. « Du coup, pour vérifier si oui ou non, il y a une activité sur place, comme on n’a pas les informations, ces personnes passent au travers des mailles du filet », constate Me Antoine Chomé.
RTBF, 04/10/2021
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