Le gouvernement mauritanien aurait expulsé le premier secrétaire de l’ambassade algérienne à Nouakchott, Belkacem Cherouati. Depuis mercredi dernier jour de ce supposé renvoi, l’affaire fait le buzz dans les médias et les réseaux sociaux pendant que les autorités algériennes observent un silence radio. Contacté plusieurs fois, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères est aux abonnés absents. La chaîne Al Jazeera a fait réagir son correspondant à Nouakchott qu a raconté dans le menu détail les circonstances de cette mesure extrême prise par le gouvernement mauritanien. On y apprend ainsi le diplomate algérien est accusé d’avoir été l’inspirateur d’un article publié dans le journal électronique mauritanien «Al Bayan El-Souhoufi», qui nuirait à la politique étrangère de la Mauritanie. Qu’en est-il exactement ?
Le correspondant d’Al Jazeera qui cite une «source sécuritaire», explique que cet article souligne que la Mauritanie s’est plainte auprès de l’ONU au sujet du trafic de cannabis marocain. On y lit notamment : «Le voisin du Sud a exprimé à l’ONU ses craintes concernant les quantités de cannabis en provenance du Maroc. Une position transmise par le président Ould Abdelaziz en personne à Christopher Ross (l’envoyé spécial de l’ONU au Sahara occidental). La plainte de Nouakchott figure dans le nouveau rapport de Ban sur le Sahara, prenant ainsi la même posture que l’Algérie et le Polisario ».
Cet article a été largement repris par les médias mauritaniens, maghrébin voire arabes a été jugé attentatoire «aux relations extérieurs de l’Etat mauritanien». C’est pourquoi le gouvernement mauritanien a convoqué le 21 avril dernier le journaliste Ibrahim Ould Moulaye Ahmed, directeur de publication d’«Al-Bayan El-Souhoufi». Une enquête a été également ouverte par la direction de la Sûreté mauritanienne pour déterminer «si cette information provenait du diplomate algérien». Le diplomate algérien a été convoqué par le gouvernement de Nouakchott et lui a signifié mercredi dernier son renvoi à Alger. Pour autant cette mesure qui s’apparente au moins à un incident diplomatique n’a été rapportée par aucun journal mauritanien. De même que le ministère des Affaires étrangères n’a pas jugé utile d’éclairer l’opinion sur les tenants et les aboutissants de cette affaire.En revanche les médias marocains s’en donnent à cœur joie depuis mercredi dans une tentative d’éclabousser l’Algérie à quelques jours de l’examen du dossier du Sahara occidental au Conseil de sécurité. S’agit-il alors d’un vrai incident diplomatique ou d’une sordide manipulation téléguidée par le Makhzen marocain ? Et, n’en déplaise à ce dernier, l’Algérie et la Mauritanie entretiennent de bonnes relations pour l’heure…
oilà bien une crispation diplomatique dont l’Algérie se serait bien passée, eu égard au contexte régional miné au niveau des frontières. Il s’agit bien de la crise avec la Mauritanie, un pays qui a toujours fait dans l’équilibrisme diplomatique entre l’Algérie et le Maroc. Ce pays, soucieux de ne pas mettre à dos le Makhzen, a visiblement réagi par rapport à un article de presse paru dans un site mauritanien et qui serait inspiré par un conseiller de l’ambassade d’Algérie à Nouakchott. Dans l’article en question le Maroc est accusé d’inonder la Mauritanie en produits narcotiques. Une accusation, qui n’est pas du goût de sa Majesté et pour s’en laver les mains les autorités mauritaniennes auraient introduit une plainte auprès de l’ONU drogue, considérant que ces informations sont de nature à nuire aux relations avec Rabat. Au niveau ministère des Affaires étrangères à Alger, c’est un sentiment d’ « étonnement » et d’ »incompréhension» qui prévalait.
Une source diplomatique qui a souhaité garder l’anonymat, nous a confirmé que le diplomate algérien, après avoir été convoqué, comme le veut l’usage diplomatique, « est rentré à Alger depuis trois jours». Cette même source considère que le motif mis en avant pour justifier cette expulsion «est totalement infondé et exagéré». A Alger, où on aurait souhaité traiter cette affaire, loin des projecteurs «voyeuristes» de la presse on est plutôt dans les regrets. «On regrette que les autorités mauritaniennes aient eu une telle réaction » ajoute cette source qui avertit que «la réciprocité» sera de mise, côté algérien . Autrement dit, un diplomate mauritanien du même niveau que son homologue algérien expulsé est appelé à subir le même sort. Au passage, le ministère des Affaires étrangères, précise « qu’il ne s’agit pas du secrétaire général de l’ambassade, pour la simple raison que ce poste n’existe pas».
La même source diplomatique algérienne se garde néanmoins de parler d’un « cassus belli », préférant minimiser l’incident diplomatique. Mais l’incident est établi. Mais que cache cette subite montée d’adrénaline de Nouakchott, pour un incident somme toute mineur, partant du fait que les diplomates ont toujours constitué une source d’information pour les journalistes. C‘est une pratique courante juste assortie de la condition « off the record». Les autorités mauritaniennes chercheraient-elles à prendre leurs distances vis-à-vis d’Alger ? L’affaire est-elle en rapport avec le dossier du Sahara occidental ?
Hamid Merakchi
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